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venezia dans
parfums le
31 Mai 2009 à 17:01
Fin mai, c'est encore la saison de la récolte des roses centifolia autour de Grasse.
On en tire de l'absolue plutôt que de l'huile essentielle, dont le rendement est trop faible (il faut 5tonnes de centifolia pour obtenir un kilo d'huile essentielle, alors que pour un kilo de
concrète, -dont on tirera un demi litre d'absolue-, 400kg de fleurs suffisent); j'ai appris que pour fabriquer de l'hydrolat de roses centifolia, les producteurs préféraient distiller les variétés
doubles; pour l'absolue, le choix se porte sur les simples (qui ne comptent qu'une cinquantaine de pétales, malgré leur nom… ).
L'absolue est surtout utilisée dans la composition des parfums.
Plantées en longues rangées, les centifolia sont d'un rose très rose, qui pâlit quand les dernières fleurs s'épanouissent sur les
pieds.
Le pistil très jaune se dévoile lorsque
s'ouvre le cœur d'abord resserré en forme de bouton.
C'est une variété mellifère, que l'on va récolter pendant 20 à 25 ans; les arbustes taillés pour avoir une croissance de 7 à 8cm par an ne sont pas des remontants (ils n'ont qu'une seule floraison
par an).
Les cueilleuses (il y a surtout des femmes) ramassent 6kg à l'heure en moyenne (on compte 400 roses environ par kilo… ); elles saisissent les fleurs
d'un mouvement tournant pour détacher la tête; j'ai été surprise de découvrir qu'on n'effeuillait pas les pétales avant la transformation…
-"et puis quoi encore", m'a dit l'un des propriétaires de ces champs fleuris.
(J'ai
photographié… une photo du Musée international de la parfumerie montrant l'enfleurage)
Grasse a longtemps pratiqué l'enfleurage (étalage des pétales sur de la graisse animale, avec renouvellement des couches de fleurs pour obtenir une imprégnation soutenue) pour produire des
gras parfumés qui servaient à adoucir les peausseries fabriquées dans la région depuis le XVII° siècle. Quand l'extraction des matières premières odorantes s'est modernisée, il y a eu un
essor de l'exploitation des plantes à parfum, alors très diversifiées (mimosa qui existe toujours, basilic, réséda, jasmin, rose centifolia), dans la région. Le choix s'est peu à peu restreint sous
la forte pression immobilière des années soixante dix et la concurrence de pays tropicaux à la main d 'œuvre bon marché.
Depuis quand les roses centifolia sont elles cultivées à Grasse? Je n'ai pas obtenu de réponse précise; probablement fin XIX°-début XX°siècle; les
centifolia (une espèce hybride) auraient fait leur apparition en Hollande au XVII° siècle. On trouve aussi 1650 comme date d'arrivée des roses dans la région grassoise, sans précision de la
variété.
Une fois cueillies et mises en sacs de jute, elles sont immédiatement transformées pour éviter les fermentations.
On verse les têtes fleuries par couches de
50kg sur de grands disques, emboités dans de grosses cuves d'acier (d'une capacité de 5 disques) que l'on recouvre de
2000l de solvant (l'hexane, toxique, inflammable, très volatil mais très efficace pour extraire pigments, molécules odorantes, etc ). L'hexane recyclé va repasser trois fois sur les fleurs avant
d'être éliminé (l'élimination finale se faisant sous basse pression pour éviter de trop chauffer, l'hexane bout alors à 30°)
Les gros "gâteaux de
roses" passées à l'hexane
4000kg de roses dans
cette boite…
Le liquide obtenu fige en refroidissant. C'est la concrète, composée de cire et d'absolue. Pour éviter l'oxydation, la boite de concrète est gardée au frais; elle peut être stockée plusieurs
années. On l'utilisera à la demande quand on voudra procèder à l'extraction de l'absolue (la partie soluble dans l'alcool).
Odeurs
Dans les champs par vent de face, le parfum des centifolia est fin et léger, pimpant je dirais, presque savonnette à la rose.
Lorsqu'on ouvre les cuves, une odeur de caramel de rose s'échappe et colle au nez.
Quant à la concrète, elle a des notes herbacées (proches de celles que l'on obtient avec les macérations huileuses). Je n'ai pas eu l'opportunité de sniffer de l'absolue de centifolia.
Au musée de la parfumerie de Grasse autour des roses
Liens
Sur l'évolution des matières premières à parfum à Grasse ici
Sur l'arrivée des centifolia à Grasse en 1895 (?) ici
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Au musée international de la parfumerie de Grasse (il a ré-ouvert en octobre dernier et ses installations sont en
train d'être finalisées), on découvre des mini-serres avec des plantes aromatiques européennes mais aussi tropicales; j'y ai donc rencontré deux de mes grands copains…
Monsieur patchouli dont les feuilles
ressemblent un peu à celles du shizo
et Monsieur vétiver en touffe (j'ai
d'abord cru à un plant de citronnelle… )
Le musée recèle d'autres merveilles, dont une magnifique collection de flacons. En voici deux d'inspiration animalière:
A la Reine des abeilles
Violet (fin XIX- début XX° s.) en cristal
La maison Violet, 12 boulevard des Capucines fournissait l'impératrice Eugénie.
Sur les parfums de cette époque (dont Violet) voir ici: clic
Bel oiseau Bleu
les sœurs Callot
design: Lucien Gaillard
1923 verre.
Premier parfum lancé par les sœurs Callot, quatre couturières chics et parisiennes des années folles.
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Quand la peau boude vraiment, un seul recours: le médecin. Quand le (bon) médecin vous envoie faire des prélèvements en labo pour analyse et que le chef dudit labo dit avec gourmandise en
découvrant les plaques :
-oh, mais c'est intéressant,…
Ravie de lui faire plaisir, mais soupirs… et trois semaines d'attente pour des résultats… au final négatifs, -avec la recommandation de ne rien faire entre temps-.
Mais ça grattait terriblement…
J'ai donc malgré tout tenté quelques essais prudents, d'abord infructueux ou même empirant la situation. Deux formules ont passé le cap, j'indique
celle qui a quasiment réglé l'histoire. C'est une crème très fondante et doucement parfumée avec différentes camomilles.
Dans ces situations où la peau ne veut plus rien, je recommande vraiment la plus grande prudence, avec un nombre raisionnable d'ingrédients déjà testés. Ce qui
marche sur une personne ne conviendra pas à une autre. En règle générale, éviter l'application d'huiles végétales pures.
Personnellement, j'ai sélectionné des ingrédients que j'utilise sans dommage depuis longtemps, j'ai éliminé les émulsifiants et cherché la synergie des camomilles, car leurs propriétés anti
inflammatoires et cicatrisantes me conviennent très bien.
Pour la réaliser, je suis partie d'une crème déjà donnée sur ce blog ici, que j'ai souvent refaite et j'ai essayé de la
peaufiner. Il ne s'agit donc pas d'une nouveauté-nouveauté, mais je trouve cette recette si efficacement douce et d'une texture si agréable que je la donne.
Il faut un coup de main pour la réussir. Je n'ai pas suivi la procédure que j'avais précemment indiquée par prudence (car j'incorpore de l'eau,
absente de la formule de base). J'ai choisi la façon de faire traditionnelle d'une émusion. Dans un premier temps, ma phase aqueuse était trop courte, et je n'avais qu'une mayonnaise ratée. J'ai
pensé à augmenter la quantité d'eau, et le mélange a magnifiquement pris. Il faut vraiment attendre un peu que la température des deux phases baisse pour faire l'émulsion. J'ai alterné bamix et
fouet "magique" à main.
Je fais mes crèmes à l'aloes avec du gel à boire. Si on utilise du gel d'aloes cosmétique, la prise est bien plus facile. Le fucogel participe à la réussite de l'émulsion. Sinon, je pense qu'une
pointe de gomme xanthane dispersée dans la phase aqueuse devrait faciliter les choses si on utilise un aloes très liquide.
Crème corporelle fondante ylang-camomilles
Phase aqueuse
130g gel d'aloes à boire
50g eau de source (Rosée de la reine): 30g + 20g ajoutés lors de la formation de l'émulsion
10g glycérine
1,5g d'allantoine diluée au préalable dans un peu d’eau
Phase huileuse
52g huile de coco vierge
4g substitut végétal de lanoline
10g acide stéarique
4g cire d’abeille fine
20gtes aox
34g huile de sésame
12g huile d'argan
7g huile de calophylle
9g macérat maison matricaire-rose
9g huile Moya ( huile d'une marque cosmétique sud africaine renfermant de l'huile d'amande douce, de l' HE camomille du cap, de l'HE de
lavande, de l'HE d' ylang)
Ajouts en troisième phase
4g fucogel
60gtes extrait CO2 camomille matricaire
20gtes HE camomille du Cap déjà diluée (à 10% dans jojoba, marque Molo)
20gtes HE camomille romaine déjà diluée (à 50% dans jojoba)
8gtes HE girofle
20gtes HE ylang
20gtes HE lavande d'altitude
10 elixir calling all angels`
40 gtes natragard
Procédé
*Plonger dans un bain marie bouillant le récipient (en pyrex ou en acier) contenant la phase huileuse. Pendant ce temps, préparer la phase aqueuse. Quand la phase huileuse s'est liquéfiée, la
sortir et la remplacer dans le bain marie par le récipient contenant la phase aqueuse (avec 30g d'eau seulement). Quand le mélange commence à être chaud- tater les parois -, sortir du bain marie.
Attendre un peu.
*Incorporer en fouettant d'abord au fouet magique la phase huileuse dans la phase aqueuse (on peut faire l'inverse) puis faire prendre au bamix (mixer plongeant qui tourne très vite). *Rajouter à
ce moment le reste de l'eau tiédie. Si le mélange a du mal à prendre, le poser dans un bain marie froid; touiller régulièrement à la pause avec le fouet magique.
Laisser refroidir un peu (les parois du récipient doivent être tièdes) avant d'incorporer le reste des ingrédients les uns après les autres, en terminant par l'extrait CO2 de camomille, le plus
coloré, ce qui permet de vérifier l'homogénéité du mélange: quand la couleur de la crème est devenue parfaitement unie, c'est fini.
Attention, la crème continue légèrement à prendre pendant 24h. Si on la met en flacon pompe, ce dernier doit vraiment bien fonctionner.
.
Quelques
remarques
*Huiles "cosmétiques"
c'est à dire des mélanges d'huiles et d'He déjà réalisés. On m'en donne parfois, je les utilise rarement directement en raison du dessèchement qu'elles provoquent assez vite. En revanche, je les
incorpore souvent comme ingrédient dans des formules. Les huiles de Weleda sont très pratiques pour ce détournement.
* Huiles essentielles déjà diluées
Sur plusieurs sites, on trouve des HE diluées (penser à vérifier le degré de dilution avant la commande) qui permettent de tester des HE chères (HE de rose diluée chez Akamuti, un délice olfactif) ou des HE que leurs vendeurs refusent d'envoyer sauf avec des tarifs
postaux exorbitants au prétexte qu'elles sont très inflammables (chez neoils par exemple).
* Macérats mélangés
Deux de mes macérats préférés pour la facilité de leur réalisation et leur bonne tenue sont à base de camomille matricaire (que je rapporte de Grèce) et de laurier (d'un jardin du sud ouest).
J'ajoute la plupart du temps des pétales ou des boutons -décortiqués- de rose pour la touche parfumée et l'impact énergétique.
* Composition parfumée
Les HE de camomille romaine et de camomille du Cap ont un parfum particulièrement doux; l'ylang va dans le même sens, en version capiteuse. La girofle apporte donc un peu de pointu et la
lavande un soupçon de tonicité. Par ailleurs, ce sont des He que j'emploie vraiment souvent, et je sais que je les tolère.
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venezia dans
Tout baume le
7 Mai 2009 à 14:29
Du beurre de cacao, des poudres, du karité… et pas mal de tâtonnements.
Pour annoncer l'été, Chabou a lancé un défi sur le blog collectif Potions et Chaudron: la mise au point d'une barre de massage parfumée avec seulement deux beurres, des poudres, des He et
une huile…
Voici le résultat de trois essais en couleur…
Le parfum sera une deuxième étape.
Si c'est joli, je ne suis pas entièrement satisfaite du résultat car le toucher reste un peu râpeux… il faut néanmoins avoir de la patience car il évolue au fil des jours.
Chabou, on va y arriver…
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venezia dans
aux petits soins le
1 Mai 2009 à 11:41
Me baladant un soir sur le net, j'ai découvert le plus exquis des blogs, celui de Kiva Rose, "medecine woman" dans la tradition américaine, installée au Nouveau Mexique, et qui parle des plantes
médicinales avec une fascinante précision poétique.
L'adresse:
http://bearmedicineherbals.com/
Su son site, elle évoque les pouvoirs (anti allergiques entre autres) de la teinture de fleurs et de bourgeons de pêcher avec tant d'éloquence qu'après avoir lu ses textes, je n'avais plus
qu'une envie: en fabriquer à mon tour.
Photo du site
visoflora, créateur d'une photothèque composée de clichés postés par des amateurs passionnés
N'ayant pas de pêcher bio sous la main à Paris, je désespérais… avant d'avoir l'idée d'en parler à l'une de mes mains vertes favorites qui habite dans le sud ouest. Elle en a localisé le jour même.
Je lui ai demandé de mettre dans de la vodka fleurs et jeunes bourgeons. Le temps que le bocal arrive chez moi par la poste, très vite, j'ai eu la délicieuse surprise, en ouvrant le pot, de humer
un exquis parfum de noyau de pêche. J'ai résisté pour ne pas filtrer sur le champ tant l'odeur était agréable, et j'ai attendu jusqu'à ce que les jeunes feuilles aient rendu leurs couleurs à
l'alcool, soit une petite dizaine de jours. Ce parfum est un vrai bonheur. Deux gouttes dans un verre d'eau suffisent à la rendre odorante. Il est impératif d'en consommer à doses très mini car
l'odeur de noyau tient aussi à la richesse en acide cyanhydrique (appelée aussi acide prussique), poison violent.
Selon Kiva Rose, la teinture de fleurs de pêcher serait non seulement un efficace anti allergique (ce que j'essaie de tester en ce moment) mais aussi, -ce que je compte bien vérifier cet été
en vacances-, un excellent calmant contre les piqûres diverses.
Traditionnellement en Europe, l'infusion de fleurs de pêcher était utilisée pour ses propriétés légèrement laxatives (voir ci-dessous le lien en français avec des recettes publiées dans un
livre édité en 1770)
Liens
en anglais:
Sur les propriétés du pêcher ici
Les articles de Kiva Rose sur le pêcher ici,
ici
ici
en français
Sur les utilisations médicinales du pêcher, extrait du:
Dictionnaire raisonné universel de plantes, arbres et arbustes de la France: contenant la description raisonnée de tous les végétaux
du royaume, considérés relativement à l'agriculture, au jardinage, aux arts & métiers, à l'economie domestique & champêtre, & à la médecine des hommes & des animaux de
Pierre-Joseph Buc'hoz ( J.P. Costard, 1770)
ici
Teinture de pêcher (orthographe fantaisiste mais charmant making of) ici
Sur les propriétés laxatives, vermifuges, calmantes, et anti spasmodiques des fleurs et des feuilles de pêcher.
On en trouve référence dans les ouvrages publiés à l'origine dans les années soixante-dix, qui puisaient dans les textes plus anciens (ceux d'Henri Leclerc notamment)
Par exemple, Maurice Messegué en parle dans son Herbier de santé, Jean Palaiseul dans Nos grands mères savaient, le petit Larousse des plantes qui guérissent également.
Dans les ouvrages de référence sortis récemment (par exemple chez Jacques Fleurentin), le pêcher n'est pas cité. Par ailleurs, les auteurs européens ne font pas allusion aux propriétés
anti-allergiques évoquées par les Américains.
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