• Baumes pieds bleus : un peu de pastel dans l'huile…






    Est-ce la chaleur? J'ai eu envie de créer un baume teinté de bleu pour les pieds. Le bleu pâle m'évoque la fraicheur. 


    Il se trouve que lors de ma récente virée dans le Sud Ouest, j'ai eu la chance de visiter la boutique-atelier consacrée au pastel à Lectoure, dans le Gers. On y présente l'élaboration du pastel, pigment extrait de la plante tinctoriale du même nom qui fit la fortune de Toulouse et de sa région au XVI°  siècle. Quand on parle de pays de Cocagne, en fait, il faut savoir que la cocagne, c'était une boule tinctoriale fabriquée à partir de la plante… C'est l'indigo ainsi que l'apparition des bleus chimiques qui eurent la peau du pastel.


    reconsitution d'un laboratoire à l'ancienne pour l'extraction du pastel.

    L'explication du processus d'extraction étant très clair sur le site du Bleu de lectoure (avec petit film à l'appui), je ne vais pas m'y attarder. Pour résumer, j'ai appris qu'il fallait passer par une  oxydation pour obtenir le pigment, qui devient alors parfaitement… insoluble. Pour son utilisation dans la teinture des textiles, on procède ensuite par oxydo-réduction. Une fois fixées par l'oxygène de l'air, les couleurs deviennent d'une résistance à toute épreuve.
      
     Des chercheurs ont  réussi à (re)trouver un liant qui permet également de créer des peintures d'extérieur, aussi séduisantes que solides. On voit réapparaitre ces nuances sur les volets et les portes des alentours. Je me suis amusée, à Auch, à en photographier.











    Les trois nuances de bleus commercialisées pour la peinture en extérieur et photographiées dans les rues de Auch

    On dit parfois que peindre les volets en bleu repousserait les insectes; en fait, seul le bleu de pastel aurait cette propriété.

    Tout ça pour dire que j'étais à la fois ravie de découvrir ce pigment somptueux, mais triste d'apprendre qu'ils ne se dissolvait dans rien. Ni dans l'huile ni dans l'eau. Je n'ai donc pas acheté de pigment pur. J'errais l'âme en peine dans la boutique bleue (qui présente par ailleurs la gamme de cosmétiques Graine de pastel, ravissante, mais dont les formulations sont hélàs conventionnelles, avec EDTA dans les savons… )  quand j'ai découvert soudain… des crayons pastel au fameux bleu de Lectoure… Avec, écrit sur le présentoir:…  à la cire d'abeille…
    Sur le champ, j'ai pensé cire d'abeille=baume… et j'ai acheté un crayon.

    La vendeuse m'a certifié qu'il n'y avait rien de toxique dans les composants. De retour à Paris, j'ai trouvé le très beau site de l'artisan pastellier qui les fabrique à Albi; dans les pastels gras naturels, il n'y a pas que de la cire et du pigment mais aussi une" huile végétale faiblement siccative". Laquelle? je ne sais pas; je compte bien le demander. En tout cas, "faiblement siccative" signifie qu'elle reste liquide à température ambiante et qu'il ne s'agit ni de lin ni d'œillette utilisés en peinture, qui sèchent vite et s'oxydent rapidement.


    Pour mon baume pieds bleus, j'ai tout bètement fait fondre un peu du crayon en compagnie des huiles et procédé comme d'habitude, en mixant néanmoins régulièrement avec un mini fouet à capuccino pour maintenir les pigments en suspension.
    Le baume a mis presque une semaine à prendre… Sa couleur est exquise, mais je le trouve légèrement granuleux d'aspect, même si à l'application, ça ne se sent pas. Je ne sais si c'est dû au pastel ou au karité qui réagit parfois ainsi dans quelques rares baumes.

    J'ai choisi une recette déjà testée et dont j'ai beaucoup apprécié la texture: celle du cacao addict. 

    Puisque j'étais déjà dans le détournement, j'ai poursuivi avec les huiles, je me suis amusée à incorporer des mélanges déjà faits…

    *L'huile relaxante à la lavande de Weleda … est très relaxante, effectivement et me semblait bien dans le ton.
    Quant à l'huile aromatiquee bio de Biguine qu'on m'a donnée un jour, elle m'a semblé appropriée;  elle renferme des HE de naiouli, géranum,  cyprès,  citron, etc drainantes et tonifiantes.

    J'ai ajouté des He de menthe poivrée et de lavande pour équilibrer le tout. C'est la lavande qui domine. Le bleu obtenu est particulèrement délicat. Il ne colore pas la peau.




    Baume pieds bleus au pastel


    90g karité
    4g acide stéarique
    48g huile coco neutre
    15g beurre cacao
    2g pastel gras teinte"fleur de Guesde". Guesde est l'un des noms du pastel. (Un crayon pèse 7g)

    J'ai tout fait fondre, laissé tiédir sans que ça ne prenne -ce qui est facile avec la présence d'acide stéarique- puis ajouté:

    16g huile à la lavande weleda
    23g huile aromatique bio Biguine
    6gtes He menthe poivrée
    20gtes HE lavande vraie d'altitude



    Il existe d'autres nuances 


    Je compte utiliser le reste du crayon dans un essai savons. Je pense qu'on peut très facilement détourner de la même manière d'autres pastels gras, notamment ceux étiquetés non toxiques, et destinés aux petits enfants.

    PS. J'ai voulu acheter de l'huile de pastel, (extraite des graines et très riche en acides gras insaturés) que j'avais déjà testée grâce à la générosité de Michèle, mais elle ne se vend que sur commande.



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  • Commentaires

    1
    Mercredi 19 Août 2009 à 00:22
    Oh que voici une démarche interessante. Il est fascinant de voir toutes les possibilités qui nous sont offertes dès qu'on sort des sentiers battus et qu'on est un peu curieuses comme toi. Une question: le pigment bleu colore-t-il légèrement la peau? J'ai fait un jour un gel bleuté pour les jambes qui, s'il ne colorait pas la peau, mettait en valeur les poils naissants qu'il noircissait à loisir. Hmm depuis, le bleu me fait un peu peur.
    Ton mélange olfactif va particulièrement bien avec le bleu, en tous cas c'est ainsi que je l'imagine. Synestésie oblige.
    Je cherche aussi à me représenter la texture de ton baume, que j'imagine fondant et crémeux à souhait avec l'acide stéarique et le coco. 
    2
    Mercredi 19 Août 2009 à 09:35
    j"ai supposé que dans les pastels gras, les pigment doivent etre micronisés, ce qui facilite par la suite leur mise en suspension. 

    la seule chose dont il faut vraiment s'assurer, c'est l'innocuité.
    rouge à levres dans les bougies, fallait y penser…
    3
    Mercredi 19 Août 2009 à 09:36
    Patte, c'est la curiosité, tout simplement, qui me fait gamberger
    4
    Mercredi 19 Août 2009 à 09:38
    comme je l'ai signalé, le baumene colore pas la peau. Tu remarqueras qu'il y en a en réalité très peu, puisque le crayon incorporé à raison de 2g renferme autre chose que des colorants;

    pour la texture, elle est douce comme celle des autres l baumes au karité, mais ça granule un peu.
    5
    Kat
    Mercredi 19 Août 2009 à 11:33
    Quelle ingéniosité et quelle imagination ! Je suis admirative de tes créations !
    C'est vrai qu'en plus, lui avoir adjoint comme senteur la lavande, fait encore plus rêver !
    J'ai hâte de voir ce que tu vas faire en savonnerie.
    6
    Samedi 22 Août 2009 à 02:11
    Très doux.
    Ton titre me rappelle un livre de Claude Ponti : Les pieds bleus.

    7
    Lundi 24 Août 2009 à 21:55
    Catherine, je suis justement en train d'utiliser ton magnifique savon si bleu que tu avais imaginé pour le biwil! Sa couleur n'a pas bougé.
    8
    Lundi 24 Août 2009 à 21:58
    Un grand merci pour toutes ces informations sur les pigments Irène.
    Certains bleus étaient obtenus avec du lapis lazuli… j'imagine le prix!
    9
    Lundi 24 Août 2009 à 21:59
    kat, je pense que le bleu obtenu sera très doux.
    10
    Lundi 24 Août 2009 à 22:21
    Et moi, je connais une  amatrice assidue de l'huile sèche de graine de pastel!  j'ai promis d'essayer de lui en fabriquer une avec des ingrédients plus clean.

    Des pieds bleus; ça m'évoque quelque chose d'aérien…
    11
    Lundi 24 Août 2009 à 22:26
    il me semble que le bleu et le vert ont tellement de nuances différentes… Il y en a pour tous les goûts.
    12
    Mardi 25 Août 2009 à 15:21
    Je n'aurais jamais osé utiliser du pastel comme colorant en cosméto, et pas dans mes savons non plus. Tu penses que ça ne craint rien ?
    J'ai une boutique de pastel sur Toulouse... ça va me tenter !
    13
    Mardi 25 Août 2009 à 21:55
    Je pense que les crayons gras pour enfants qui ont un label de non toxicité ne posent aucun problème. Sinon, ça dpend des pigments. 
    14
    Mercredi 26 Août 2009 à 10:45
    OK merci, je regarderai des crayons pour enfants alors !
    15
    Jeudi 27 Août 2009 à 22:24
    Préviens si tu te lances pour colorer des savons avec, ça peut donner des couleurs interessantes.
    16
    Vendredi 28 Août 2009 à 07:32
    Oui, je te dirai ça ! Mais il faut que j'aille sur Toulouse pour me procurer le bleu, alors ça ne sera pas pour tout de suite !
    17
    Mardi 15 Décembre 2009 à 21:13
    J'ai enfin pu aller à la boutique et, n'ayant pas relu ton article, j'ai acheté 40 gr de pigment pur, du superbe pastel. Panique à la relecture de ton message, mais tant qu'à y être , j'ai testé. Dans l'eau, grosses boules de pigments bien compact et eau désespéremment blanche... impressionnant comme ce pigment n'est pas hydrosoluble.
    Par contre, petit test dans l'huile... et ma foi, l'huile s'est colorée, avec un peu de dépôt au fond, très léger... qui indique que le pigment n'est pas totalement miscible mais...
    Du coup j'ai tout sorti et fait un baume en ajoutant mon pigment dans le bain-amrie. J'en ai mis un peu trop... le baume est d'un magnifique... bleu nuit ! Mais superbe. et il ne colore pas la peau par contre, et pas de dépôt au fond du pot.
    Conclusion de ce com outrâgeusement long : mon mari m'a expliqué que le pigment était certainement jsute émulsionné dans l'huile, mais de façon si fine... qu'on peut, niveau cosmétique, le considérer comme mélangé...
    18
    Mercredi 16 Décembre 2009 à 00:43
     Nansou,

    ce que tu dis est fort interessant et contredit les réponses fournies sur place quand j'avais évoqué la question de la dissolution; les gras des baumes sont des bons joueurs … je pense que si on regardait à la loupe on verrait probalement des micro particules en suspension.
    un grand merci pour le détail de ton expérience.

    Après ce baume , j'en avais fait un second (non publié) plus bleu encore mais pas avec du pastel. il fait partie des récalcitrants qui ne voulaient pas prendre (enfin, ll a  fini par solidifier quand même)
    19
    Mercredi 16 Décembre 2009 à 08:13
    Je mettrai les photos en ligne bientot. Le baume a éclairci durant la nuit, il est bien bleu. quand je prends un epu de baume et que je l'étale, la couleur est bien uniforme, n'a pas fait de paquets.. donc je pense que c'est tout à fait exploitable !
    En effet, j'aimerais avoir une bonne loupe pour savoir ce qu'il en est vraiment !
    20
    Mercredi 16 Décembre 2009 à 12:46
    j'ai vu, la couleur est magnifique
    21
    Lundi 6 Septembre 2010 à 09:31

    Bravo !
    Une bonne idée... j'aime ce genre d'initiatives créatives ^^

    22
    Lundi 6 Septembre 2010 à 22:18

    merci de ta visite qui m'a permis de découvrir ton joli blog.

    23
    Irene
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:35
    Il est vrai que, dans cette recette, je ne me suis attardée que sur le bleu, le pastel, bref, tout ce qui me ramenait à la peinture. Et pourquoi ? Parce que je pensais tout à l'heure à la possibilité de faire fondre un pastel à l'huile (il faudrait que je vérifie la composition) mais également des pigments naturels dont j'ai une belle collection et avec lesquels je peins (rarement, c'est in travail de bénédictin) des tableaux avec la méthode - la vraie - "al fresco", dans les mélanges pour savons. J'avais utilisé la méthode du bâton de rouge à lèvres dans la cire pour les bougies avec succès. Mes pigments naturels sont des terre mais qui viennent de partout (dont certaines d'Inde). D'autres, d'Afghanistan (je pense qu'il serait évidemment impossible d'en avoir maintenant ...). C'est incroyable, on cogite ...
    Je reviendrai voir la recette.
    24
    patte
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:35
    là, je reste sans voix...Heu...sans doigts (tous figés sur le clavier)
    Je suis EPATEE devant cette réalisation et ta faculté de créer une formule à partir de tes découvertes
    25
    Catherine
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:35
    C'est bleu, c'est Bô !!! ingénieuse Venezia qui sait tirer profit de toutes ses trouvailles ; dommage que ton baume granule, mais j'attends avec impatience le résultat de ton pastel dans les savons, j'adore la couleur bleu.
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    26
    Irene
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:35
    Chez Codina, il y a de l'huile de pastel. La mienne n vient pas de là, mais j'ai trop chaud pour aller fouiller !
    Chez ce fournisseur et sur cette page, vous avez des informations intéressantes sur les pigments utilisés en beaux arts :
    http://www.blockx.be/fr/actu/toxicite.asp
    Je vous mets une page pour un pigment : vous avez le descriptif et la garantie en pdf à télécharger. (comme pour tous leurs produits) :
    http://www.blockx.be/fr/catalogue/pigments_noir-d-ivoire-_1125_blockx.html

    Je n'ai pas d'action chez eux ! Je sais que leurs aquarelles sont fabriquées dans les règles de l'art. Et ils ne fabriquent pas de pastels à l'huile.
     
    Des informations sur les pigments ici : mais leurs pastels à l'huile ne paraît pas réalisé avec un support correspondant à nos besoins :
    http://www.sennelier.fr/fr/pigments/histoire.php

    Bon, chacune fait suffisamment attention pour prendre soin de lire la composition et se renseigner.
    Ceci dit, merci Venezia pour cet article très intéressant et ta recette. Je suis très nostalgique quand je vois tellement de belles choses se perdrent et ... si rapidement.
    Le prix d'un vrai pigment bleu outre mer, tel que l'utilisait Turner (et tous les autres bleus artistes d'ailleurs) coûte maintenant les yeux de la tête. Mais il y en a d'autres qui disparaissent au profit de la chimie alors qu'il n'y a pas de raison financière.
    Mais, en Italie, par exemple .... en flânant dans les quartiers des restaurateurs d'art, on trouve des trésors (naturels)  à un très bon prix dans des petites boutiques merveilleuses.
    27
    Loulou
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:35
    Décidément, le bleu restera ma couleur préfèrée! Vénézia, tu me fais rêver en bleu!
    Merci Irène pour le complément d'informations.
    28
    Loulou
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:35
    Tu as raison Vénézia, tous les bleus ou verts ne sont pas égaux. Il y a certains bleus que je n'aime vraiment pas... et d'autres que j'adore!
    29
    michele
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:35
    Effectivement la gamme Graine de pastel est bien concue sur le plan marketing.
     J'ai une cliente qui ne jure que par leur crème corporelle qu'elle me met sous le nez quand elle le peut.

    Lassée de lui dire que ce n'est pas une gamme naturelle, que ce parfum est artificiel, que la couleur bleu pastel est artificielle, qu'il y a de la paraffine et des silicones dedans, j'ai fini par lui mettre moi aussi un peu d'huile de pastel sous le nez .
    Mais rien n'y fait ... elle adore!

    Et c'est vrai que c'est une gamme qui contribue au renouveau de la culture de cette plante autrefois trésor de cette région. Il va me falloir rappeler Mr L...

    Le bleu va bien aux pieds. Pourquoi dis-moi?
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