• Savons verts à la consoude

    … d'abord pour le plaisir d'utiliser des plantes fraiches, car j'ai eu la chance d'en ramasser récemment en compagnie de cueilleuses aussi adorables que bavardes…


     

    Il y a une étrange aura autour de la consoude, plante très présente dans la culture populaire et de façon plus distanciée dans les livres de phyto, pour ses propriétés cicatrisantes et réparatrices sur les plaies, les hématomes, les foulures, voire les fractures. 

     

    On sait aujourd'hui que ses racines et dans une moindre mesure ses feuilles renferment des alcaloides pyrrolizidiniques,vraiment toxiques pour le foie. Leur utilisation est donc déconseillée, surtout en interne. On trouve des recettes de jeunes feuilles en beignets, je suppose qu'une seule fricassée gourmande dans l'année devrait être tolérable, si on est en bonne santé. En externe, la commission E (autorité allemande de contrôle de phytomédecine) conseille de n'utiliser la consoude que sur une durée de six semaines maximum dans une année. 

     

    Que dit-on exactement de cette plante de la même famille botanique que la bourrache? Voici deux excellentes pistes de recherche:


    * Pour consulter en accès libre des textes médicaux anciens (on entre un mot clef, et la liste des ouvrages où il apparait s'affiche, il suffit de s'y rendre ensuite)  : ici

     

    * Autre merveilleuse source d'informations: Le dictionnaire des plantes médicinales et vénéneuses de France de Paul-Victor Fournier, publié en 1947 et très bien réédité chez Omnibus en 2010, avec, notamment, une préface de Clotilde Boisvert (créatrice de l'Ecole des plantes) racontant la vie de Fournier, qui fut chanoine et passionné de plantes et de botanique. Ce livre est un vrai bijou de précision et d'érudition.


    L'article consacré à la consoude en est un excellent exemple. Ainsi, Fournier retrace l'évolution des vertus attribuées à la consoude. D'astringente, elle devint émolliente… Il note aussi la divergence entre la médecine officielle qui abandonna peu à peu son usage et la culture populaire qui lui restait fidèle. Des médecins anglais ont découvert au début du XX° siècle que la plante renfermait de l'allantoïne, actif très réparateur, ce qui l'a faite ressortir de son purgatoire. Comme Michèle le note dans son commentaire à mon article précédent, voir ici, l'allantoïne étant hydrosoluble, on a des chances de l'extraire via des teintures ou des infusions, et non dans des macérations huileuses (pourtant toujours pratiquées).

     

    Pour Fournier, c'est surtout la racine qui s'avère intéressante -elle renferme plus d'allantoine que les feuilles- , même si les feuilles sont  émollientes (= adoucissantes).

    Dans les recettes recensées, il cite le cataplasme de racines fraiches écrasées à poser sur les plaies, ulcères, piqures d'insectes, articulations goutteuses, et même fractures.

    Outre l'allantoïne, la plante renferme des tanins, des mucilages, des minéraux, de la vitamine B12, de l'acide rosmarinique. Il y a des recettes avec de la poudre de racines séchées mais la plupart du temps, c'est la plante fraiche qui est recommandée.

     

    A propos de l'emploi des feuilles


    James E. Duke, grand herboriste américain, recommande leur utilisation, fraiches, en friction sur des plaies par exemple. "Elle reste mon premier recours en cas de plaie lente à cicatriser", écrit-il dans Le pouvoir des plantes (Marabout). Il suggère la teinture (de feuilles) à raison de quelques gouttes dans un shampoing contre les pellicules ou dans des préparations pour apaiser le syndrome du canal carpien. 

     

    Le site canadien Passeport santé fait état d'études sur les propriétés cicatrisantes des feuilles. Voir ici

     

    Si Maria Treben l'herboriste autrichienne auteur best seller de La santé à la pharmacie du Bon Dieu a des mots lyriques pour décrire l'efficacité de la racine, exemples frôlant le miracle à l'appui, elle parle aussi de celle des feuilles.

     

    N'ayant ramassé que les feuilles (avec quelques fleurs blanches en prime), j'ai décidé de jouer avec pour les savons, sans me faire d'illusions sur leurs éventuelles propriétés thérapeutiques néanmoins… 


     

    P1020082.jpgConsoude en fleurs au premier plan, feuille de basilic thai à droite, tronçons de feuilles rigides de pandanus en arrière plan

     

    *J'ai d'une part préparé pour dissoudre la soude une infusion corsée de consoude en y ajoutant des feuilles fraiches de pandanus et de basilic thai pour leur parfum.


    *J'ai par ailleurs fabriqué une macération de feuilles dans de l'huile d'olive bio, complétée avec un reste de macérat huileux de consoude-thé vert dans du sésame.

     

    infusion et macérat étaient d'un beau vert.

     


     

    Savons verts à la consoude


     800g d'huiles


    48 ricin

    64 beurre de cacao

    240 coco indienne odorante

    240 olive dont 140 macérée à la consoude

     100 arachide raffinée

    48 karité du Bénin de Michèle

    60 sésame bio (dont 32 macérés à la consoude avec du thé  vert)

     

    1 cuillérée à  café de crème fraiche dans les huiles


    280g d'infusion aqueuse concentrée de feuilles de basilic thai, de pandanus, de feuilles et fleurs de consoude dans de l'eau déminéralisée, (moitié en glaçons, moitié gardée au froid)

    Soude  pour un surgraissage à 8 environ

     

    Un peu de mica bleu… pour soutenir le vert


    Parfum


    Je n'ai pas parfumé toute la pate pour tester le parfum des herbes seules après saponification.


    Dans la moitié des huiles:

    Il me restait des fonds très résineux et très odorants (mais que je n'ai pu peser) d'He de vétiver et de patchouli, je les ai dilués.

    6g de coco fractionnée avec du vétiver

    5g  de coco fractionnée avec du patchouli

     

     

    P1020085.jpgAu fond, j'ai démoulé un peu trop tôt le savon, d'où l'aspect un peu grumeleux en surface. Le savon le plus foncé est celui du milieu, coulé dans un  moule milky-way. Le cube au premier plan, le plus clair, est sans HE.

     

    J'ai coulé dans trois moules différents… et obtenu trois nuances de vert.


    Les savons sans HE sont restés plus pâles et sentent légèrement le pandanus. Dans les autres, le parfum du vétiver vient en premier, puis arrive le pandanus. J'attends le patchouli…

     


     

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 23 Mai 2013 à 19:41

    Venezia, merci beaucoup pour cette recette !

     

    Le savon au centre est très joli.

    2
    Jeudi 23 Mai 2013 à 20:29

    Merci pour ce retour d'expérience. J'avais fais un macérat huileux de consoude l'année dernière. J'apprends chez toi qu'il vaut mieux une infusion. 

    Bravo pour le savon, j'adore sa couleur.

    3
    Samedi 25 Mai 2013 à 12:11

    C'est extradorinaire cette différence de couleurs selon les moules ! Cela complique - ou nous donne encore davantage de possibilités de jouer !

    Empiriquement ou pas, j'aime beaucoup la consoude. Je l'utilise en macérât huileux pour les douleurs musculaires (pas seule ...), et je joue avec les macérâts pour faire des verts en savonnerie.

    Je trouve ton choix pour l'odeur et la couleur  de ce savon remarquablement approprié et judicieux.

    Quelle chance nous avons de pouvoir bénéficier de ces bibliothèques numériques, j'y passe pas mal de temps, c'est tellement intéressant. Merci pour ce lien là que je ne connaissais pas.

    Et merci pour ce bel article Princesse

    4
    Dimanche 26 Mai 2013 à 07:21

    Bojour Oiselle,

     

    tu fais bien d'évoquer l'utilisation de la consoude au jardin , très iteressante

    5
    Dimanche 26 Mai 2013 à 07:22

    Vioette, c'est vraiment le moment car elle est jeune et pleine de vigueur

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    6
    Dimanche 26 Mai 2013 à 07:23

    Merci Colchique. Ce moule milky way donne  de très jolis savons… il faiut juste être assez patiente pour attendre de pouvoir démouler facilement!

    7
    Dimanche 26 Mai 2013 à 07:23

    Nansou,

     

    le pandanus est vraiment la plante à utiliser si on veut parfumer des savons sans HE

    8
    Dimanche 26 Mai 2013 à 07:27

    Mureille,

     

    pour la couleur dans un savon, le macérat est parfait. Pour l'effet thérapeutique, c'est mieux l'infusion mais je ne suis pas du tout sure que ces effets se retrouvent au final dans le savon

    9
    Dimanche 26 Mai 2013 à 07:31

    Ma chère Sirène,

    c'est vrai que depuis très longtemps, j'associe dans ma tête le vert avec le partchouli et le vetyver. Une synesthésie ue j'ai du mal à expliquer d'ailleurs…

    10
    Lundi 27 Mai 2013 à 12:23

    Oh ça donne envie!

    Le macérat huileux et l'infusion, c'est ça qu'ilfaut pour en tirer le maximum de cette consoude. As-tu mis les fleurs aussi ou juste les feuilles?

    J'ai cueilli quelques inflorescences de pommier ce WE en Bretagne comme l'an dernier. Je vais les mettre à contribution

     

    As-tu eu des hases de gel dans certains des moules? On dirait que le carré en a eu une non?

    Le matériau influe aussi sur le coloration je trouve. Le matériau, le gel, le volume...

     

    Ce qui m'épate c'est l'odeur due au pandanus et la disparition du patchouli ...

    11
    Jeudi 30 Mai 2013 à 08:15

    Coucou Emadra,

     

    la matière des moules joue sur la rapidité du refroidissement, donc sur l'intensité des couleurs. Meme les silicones ne réagissent pas tous de la même façon (idem pour la faciltié de démoulage et l'aspect lisse ou non de la pate).

    12
    Jeudi 30 Mai 2013 à 08:18

    Michèle,

     

    j'ai mis fleurs et feuilles dans l'infusion comme on peut le voir sur la photo et feuilles dans le macérat.

     

    Je n'ai pas eu de phase de gel dans les moules cubiques; Ce qui a aussi contribué à foncer légèrement la pate das les autres moules, c'est l'ajout d'HE de couleur sombre -ce qui doit de parler au vu du joli article sur les couleurs des HE que tu viens d'écrire…

    quant au pandanus c'est le roi triomphant sur la soude!

    13
    Jeudi 30 Mai 2013 à 08:18

    Merci gingembre, le vert est quand même une couleur aisée à obtenir en savonnerie…

    14
    oizelle
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:06

    bonjour,

    j'adore la consoude; j'en mets dans la mousse à raser

    et aussi au fond du trou creusé pour planter les tomates (et quelques orties )...tant qu'à faire !

    15
    violette
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:06

    ah la consoude j'ai 2 pieds planté il y a peu qui attendent patiement leur ampleur je ne suis pas sure de pouvoir en faire quelque chose j'en ai pas assez mais il y en a beaucoup j'ai ma mere et je crois que je vais une rasia a ma prochaine visite j'aime beaucoup cette plante ^-^

    16
    nansou
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:06
    j'aime tes essais de savons ! Celui sent parfum ajouté a tout de même une odeur apparemment, c'est intéressant à savoir!
    17
    Emadra
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:06

    Mon neveu alors âgé d'une dizaine d'années disait déjà que les filles sont des pipelettes ;) il va bientôt fêter ses 18 ans.

     

    Chère Princesse, ton superbe blog est non seulement très inspirant ainsi que très très instructif.

    Et tu prouves une nouvelle foisd que l'on ne peut utiliser les plantes sans certaines connaissances.

     

    Tes savons sont magnifiques et ces camaïeux de vert juste sublimes, on dirait du jade, notamment pour celui du centre.

    J'avais déjà remarqué que la taille d'un moule pouvait jouer sur la couleur, il me semble que c'est lorsqu'il y a une phase de gel.

    Mais là suis surprise car tous tes savons ont sensiblement la même taille.

     

     

     

    18
    gingembre
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:06

    Une belle leçon de plantes ! Tes savons sont sublimes !

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