• Sur l'île d'Islay: à la recherche du myrique baumier (bog myrtle)

     

    Je viens de passer quelques jours sur l'île d'Islay, au large de Glasgow, réputée pour ses whiskies au parfum de tourbe. Avant mon départ, j'avais lu qu'on avait parfois utilisé le myrique baumier dans l'élaboration de bières. Sur place, j'ai vraiment œuvré pour trouver cette plante. J'y suis arrivée… non sans mal.  

     


     

    P1010964.jpgIslay est un paradis pour les âmes solitaires qui apprécient les fermes isolées

     

    Faire des recherches sur le myrique via internet est un vrai sport, car il se dissimule sous de multiples appellations:

    en français: myrique baumier, galé odorant, myrte des marais, myrte batard, piment royal, piment aquatique, etc ; au Canada bois-sent-bon. 

    en langue anglaise: bog myrtle, sweet gale, scotch gale

    en gaélique: roid

    en latin: myrica gale   

     

    P1010990.jpgLes moutons ont été plus faciles à trouver que le myrica gale

     

    C'est une plante intrigante de la famille des myricaceae, dont on utilise -avec prudence- toutes les parties: graines, feuilles, rameaux, châtons, racines … à titres divers. Elle est notamment tenue pour abortive, sudorifique dans les pneumonies, ayant une action astringente, active dans les maux d'estomac, les problèmes hépatiques, et peut être avec des propriétés anti-cancéreuses. Elle a des effets insecticides et herbicides.(Voir par exemple à ce sujet l'article de wikipedia, en anglais, bien plus complet que la Vf, pour laquelle j'ai fait un lien sur myrica gale). Elle favoriserait  aussi les rêves lucides, motif qui, il y a quelques années, avait attiré mon attention… 

     

    P1020047.jpgAu milieu des roseaux, l'île d'Eileen Moor, sur le Loch Finlaggan. Au Moyen age, elle fut le fief des MacDonald, les seigneurs d'Islay. 

     

    En cuisine, on peut l'employer en substitut du laurier dans les sauces, en prenant soin d'ôter les feuilles en fin de cuisson pour éviter l'amertume. Elle contribuait à parfumer la bière avant l'emploi du houblon, dans des mélanges de plantes baptisés gruit ou grut. Certains s'amusent encore à en faire des macérations alcooliques… à boire.

    Les graines auraient un parfum de muscade .


     

    P1020063.jpgUn bog myrtle rougeâtre, planqué dans les broussailles

     

    En dermato, la marque Boots l'emploie dans une ligne cosmétique pour ses effets anti-oxydants et anti-bactériens (contre l'acné notamment). En Grande-Bretagne,  on trouve d'ailleurs de nombreux savons, artisanaux ou pas, qui en referment mais c'est surtout son action insecticide contre les midges (ces mini-insectes piqueurs et terriblement envahissants présents dans les pays scandinaves, au Canada, en Ecosse ou en Irlande pendant l'été)  qui semble intéressante.

     

    Ses feuilles au puissant parfum balsamique secrètent une résine. Elle ont aussi une grande force tinctoriale même sans avoir à mordancer la laine. Elles donnent un ton jaune en début de saison et du vert à l'automne, comme me l'a expliqué une artisane d'Islay qui s'en sert. 

    On utilisait également la cire extraite des fruits pour fabriquer des bougies (probablement un travail de patience, vu leur taille menue… ).

     

    C'est un végétal très costaud qui apprécie les lieux humides, landes et tourbières, et résiste aux intempéries et à la pauvreté des sols.

     

    Sur le net, on peut trouver de l'hydrolat, de l'huile essentielle, de la teinture-mère (d'écorce des racines), des dilutions homéopathiques, voire des feuilles ou des graines séchées, mais  en Ecosse et au Canada -sauf pour la teinture mère et les produits homéopathiques.

     

    J'ai donc sillonné Islay pour en dénicher, d'abord en vain car je cherchais à identifier les feuilles. C'était trop tôt. Un truculent guide qui se rappelait où il en avait ramassé quand il était gamin a retrouvé l'endroit… et m'a montré quelques plants à la tige rougeâtre, sans l'ombre d'une feuille, mais porteurs de minuscules chatons orangés (les chatons mâles). Les chatons femelles arborent un plumet rouge; j'ai donc ramassé quelques branchettes qui macèrent déjà dans de l'alcool (les chatons d'un côté, les tiges légèrement écrasées de l'autre).

     

    P1020075.jpgUne part de ma modeste récolte

     

    J'espère en tirer un peu du parfum des landes d'Islay.   

     

    J'avais acheté il y a pas mal de temps déjà de l'HE en GB. Je l'ai utilisée à l'occasion dans certaines recettes (dans un savon par exemple ici ou dans un baume bleu pour les pieds qui ne voulait pas prendre… ici).

    En son temps, Pescalune avait préparé un lait corporel parfumé au myrique baumier avec un hydrolat et une HE achetés en Bretagne auprès de Clément Pallier (voir ici). Le site de Pallier  (www.ferme-kermorvan.com) semble hélàs en ce moment en repos.  

    Michèle avait également proposé sur Potions "myrica rose", une crème pour le visage et les mains avec du myrica gale. 

    « Crème visage au P3R, karité et ester de sucreSur l'île d'Islay: des savons… au wisky bien sûr »

  • Commentaires

    1
    Lundi 29 Avril 2013 à 14:46

    Belle opiniâtreté! As-tu une raison particulière pour faire des macérations alcooliques différentes pour les branches et les chatons?

    J'avais testé l'HA de myrique en interne sur plueirus semaines sans éprouver les effets  dévastateurs du fragonia sur les rêves; Aurait-on une sensibilité individuelle de cette action selon les plantes?Susan Catty en faisait une description magique ;)

     

    J'ai le souvenir d'une très agréable sentuer de cette crème fabriquée pour Pescalune; J'avais dû la débaptiser en Myrica rose car le nom Piment royal était déposé par un site de sex toys qui nous menaçait de procès

     

    Merci pour ces retours enchanteurs!

     

     

    2
    Mardi 30 Avril 2013 à 10:53

    Venezia, la première photo sans un seul arbre me fait penser à un désert de fine moquette verte avec une maison peut-être hantée.

     

    Ces paysages me plonge dans les films le chien des Baskerville, les hauts de Hurlevant et Jane Eyre.

    3
    Mardi 30 Avril 2013 à 14:49

    Nansou, les paysages y sont plus mélancoliques que les gens…

    4
    Mardi 30 Avril 2013 à 14:50

    Tu as tout à fait raison ed, on dirait de micro pommes de pain, mais c'est doux doux-mou

    5
    Mardi 30 Avril 2013 à 14:52

    Coucou Michèle,

     

    pourquoi deux macérations différentes? Parce qu'on n'attribue pas des propriétés identiues aux branchettes et aux chatons, j'imagine donc que leur composition chimique est différente d'où un parfum que je suppose différent… donc je teste.

    6
    Mardi 30 Avril 2013 à 14:53

    Sylvie, tu vas te régaler. Peut être auras-tu la chance de pouvoir repérer plus facilement le miryque baumier, si la saison est plus avancée. C'est un arbuste effectivement hyper réssitant.

    7
    Mardi 30 Avril 2013 à 14:54

    merci Lys blanc, je dois signaler quand meme qu'il y avait pas mal d'amateurs de whiskies en goguette, mais plutôt près des distilleries!

    8
    Mardi 30 Avril 2013 à 14:56

    Colchique,

    Il y a énormément de maisons fort isolées (à Islay, mieux vaut ne pas oublier sa baguette quand on fait ses courses si on habite loin de tout, d'autant que tout ferme à 17h pétantes… ) mais bien plus de moutons que de chiens… ce n'est donc pas Baskerville

    9
    Mardi 30 Avril 2013 à 18:49

    Si tu as cherché la plante dans la bière cela a dû être une quête bien fatiguante. Je plaisante, ta note est très fournie et vraiment intéressante. Je voyage.

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    10
    Dimanche 5 Mai 2013 à 23:27

    Merci Ariaga, je n'ai meme pas pu tester la bière, les heures d'ouverture des pubs ne collaient jamais avec mon emploi du temps bien rempli!!

    11
    Jeudi 16 Mai 2013 à 18:10

    J'ai fait lire ton article à quelques membres de ma famille et, normalement, l'un d'entre eux va organiser un petit voyage par la-bas. J'en ai envie et besoin.

    Je me souviens parfaitement de l'article de Michèle et de la rigolade qui s'en était suivie.

    Un bonheur de te lire, un grand bonheur ... Bises

    12
    Vendredi 17 Mai 2013 à 08:47

    Quelle belel idée; je vais t'envoyer des info supplémentaires alors!

     

    Je pense qu'il faut juste éviter le plein plein été en raison de mini moustiques très obstinés

    13
    Dimanche 19 Mai 2013 à 19:40

    Ton article donne vraiment envie d'aller faire un tour sur cette île. De belles découvertes en perspective. Merci pour ce partage.

    14
    Jeudi 23 Mai 2013 à 16:55

    Loulou,

     

    Il y a plein de myrique baumier au Canada!! Un de mes sites canadiens préférés, -je me contente de le lire… -Aliksir en parle.

    15
    nansou
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:07
    Quelle chasse aux trésors !!! bravo d'en avoir trouvé ! cette île semble magnifique, je pense que j'adorerais, mais on doit vite ressentir une certaine mélancolie... J'espère que tu parviendras à extraire un peu de parfum des landes !
    16
    emadra
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:07

    Je reconnais ta persévérance belle Princesse 

    Les paysages sont magnifiques, et point beaucoup de voisins.

    Cette île doit être très dépaysante et vivifiante.

     

    Ta récolte est superbe, sur la photo, tes chatons ressemblent un peu à de minuscules pommes de pin

     

    17
    sylvie
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:07

    trés intéréessant! je parts pour l Ecosse bientot et j espere profiter de si beaux paysages et qui sait trouver du fameux myrique baumier ,qui a l air trés résistant :pas étonnant vu les conditions climatiques..bises et merci.

    18
    lys Blanc
    Vendredi 15 Août 2014 à 22:07

    Cette île est en effet un véritable paradis pour les solitaires.

    C'est un vrai plaisir de lire tes recherches et de découvrir cette plante.

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